Vous n’y pensez jamais et elle, pourtant ,elle vous suit partout, votre ombre. A coup de jeux de pieds, jeux de mots et jeux d’ombres, le chorégraphe Philippe Decouflé a traqué ces silhouettes qui tournoient et s’allongent… Au théâtre national de Chaillot, jusqu’au 13 décembre, Sombreros allie poésie, humour et magie…
« Je ne me considère pas comme un chorégraphe, j’ai toujours cherché à aller plus loin que la simple danse. J’aime le mélange, à l’image de notre monde de plus en plus métissé. Ce qui m’intéresse, c’est de réunir un geste, une couleur et une lumière, des techniques qui ne sont pas faites a priori pour être mises ensemble… » expliquait Philippe Decouflé à l’occasion de son spectacle, « Sombrero ». La recette décrite s’applique à Sombreros, deuxième version du spectacle créé au Théâtre de Nîmes en octobre 2006.
Tout commence par un duo : un homme en chair et son ombre, derrière, qui, humaine pour l’occasion, le suit à la trace. Belle vision de l’ombre, mais bien manichéenne, incomplète… car qui sait si ces noires figures ne vivent pas leur propre vie dès que les humains sont partis, dès que la nuit tombe ou que le soleil est à midi ? Les ombres chinoises l’illustrent déjà, l’ombre est une illusion : l’ombre d’un arbre n’est pas toujours projetée par un arbre… Bien au contraire, pourquoi ne serait-ce pas l’original qui s’adapterait à son ombre ? Ainsi, chez Decouflé, après avoir été suivis par leurs ombres, les danseurs ondulent au rythme de ces dernières, courent derrière elles. Certaines ombres mènent tout simplement leurs propres vies, s’associant entre elles plutôt qu’à des objets réels : François et Françoise par exemple, « sombres héros » du spectacle, s’aiment et se recherchent en tous coins de la terre.
Dans cette folle épopée, point de carte pour avancer, en revanche, la langue doit être bien pendue : comme un inconscient, une ombre est très sombre et, pour l’explorer, jeux de mots et associations d’idées sont recommandés ; comme un inconscient, une ombre peut vivre un enchaînement d’aventures improbables : après-midi sur la plage et ballade en pays mexicain, partie de ski-nautique et folle course-poursuite… Faite au départ d’entrechats et d’une pureté poétique, la scène va donc peu à peu se peupler : humoristes, baigneurs et cowboys vont y ramener leurs maracas et leurs chevaux, trimbaler avec eux, leurs ombres au sol ou sur écran aux rythmes des musique de Brian Eno, Béla Bartok, Claude Debussy et Enrico Morricone.
Entre temps, le spectateur a perdu de vue François et Françoise, l’ombre du début et la jolie étoile blanche, mais comme dans un rêve, les enchaînements, si absurdes soient-ils, lui paraissent naturels. Certes certaines vidéos ont pu lui paraître un peu longues, comme si, ce faisant, le chorégraphe lui prouvait, insistant, qu’il maîtrisait la technique (qui se confond bien souvent pour le spectateur avec de la magie). Il n’empêche, le cinéaste-metteur en scène- régisseur son-lumière reste un danseur, son œuvre en garde une évidente harmonie et une légèreté dans l’élévation… A voir donc !
Chorégraphie de Philippe Decouflé. Musique de Brian Eno Avec Clémence Galliard, Yannick Jory, Sébastien Libolt, Alexandra Naudet, Leïla Pasquier, Aurélia Petit ou Nathalie Hauwelle (en alternance), Christophe Salengro, Olivier Simola, Christophe Waksmann
Sombreros, au Théâtre National de Chaillot, jusqu’au 13 décembre, à 20h30 1 place du Trocadéro, Paris 16e, 01 53 65 30 00, relâche le lundi ainsi que les 23, 25 nov et 7 er 10 dec. 1h30 sans entracte. Moins de 26 ans : 12 euros.
Puis :
Le Volcan, Scène Nationale, Le Havre, du 18 au 20 février 2009
Théâtre National de Nice, du 25 au 27 mars 2009
Scène Nationale de Narbonne, du 1er au 3 avril 2009
Centro Cultural de Belém, Lisbonne, Portugal, les 15 et 16 mai 2009
La Passerelle, Gap, les 26 et 27 mai 2009
Théâtre National de Porto, Portugal, les 3 et 4 juillet 2009.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire