mardi 26 juillet 2011

Nicolas et Jacques Bonneau : conteur et tueur


Fait(s) divers. À la recherche de Jacques B : un spectacle de Nicolas Bonneau, vu au festival d'Avignon à la Manufacture. Un bijou du "off".

Jacques Bonneau, « l’ogre de Picardie » a, dans les années 80-90, tué sept femmes... sept victimes étranglées dont les seins (un par femme) étaient conservés dans du formol.

Nicolas Bonneau n’a pas grand-chose à voir avec Jacques : il n’est ni médecin, ni tueur en série, pas picard non plus, quoique parfois surgelé. Il est conteur, auteur et comédien. C’est un soir, en regardant la télé, un « faites entrer l’accusé » consacré à la Picardie, qu’il a découvert ce Bonneau, nom prononcé par une femme qui lui avait réchappé. Le lendemain, le téléspectateur a eu une idée : faire un spectacle où Bonneau enquêterait sur Bonneau. «Ce serait marrant » se disait le comédien, léger.

Marrant de suivre les traces d’un tueur en série, de se poser aux bars de vieux cafés picards, d’essayer de comprendre ce qu’il ressentait dans les villages dévastés des alentours de Beauvais, face à ses patientes, en rentrant chez lui le soir auprès de sa femme et ses enfants, ou lorsqu’il marquait soigneusement d’un coup de feutre le sein de sa victime, avant de le découper… Ce serait marrant aussi de se jouer, soi, comédien, en train d’enquêter, d’alterner sur le plateau les deux Bonneau, et d’imaginer que Bonneau, l’autre, pourrait, lorsqu’il aurait expié sa peine, se trouver là, dans le public, à se regarder au travers des yeux du comédien.

Ce serait marrant, et troublant… Une superbe performance d’acteur en tous cas, un incroyable talent de conteur et quelques questions : sur la banalité du mal, le fait qui fait « diversion », sur le rôle de l’art : peut-on ainsi faire de la vie d’un meurtrier un spectacle grinçant certes, mais comique avant tout, alors que l’homme est peut être encore enfermé ? Est-ce une double peine ? Ou un hommage qui lui serait rendu pour la matière qu’il aurait mis à disposition d’un comédien désireux de remplir une salle et d’un public voyeuriste ? Cela devient en tous cas un conte rondement et finement mené, un plaisir de spectateur, et sûrement d’acteur. À voir !

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